Alcatel-Lucent : pas de dividendes pour les petits porteurs, des stock-options pour Pat Russo
Avant même l'ouverture de l'assemblée générale des actionnaires d'Alcatel-Lucent, vendredi 30 mai, l'affaire était pliée. Il était acquis que la résolution controversée fixant les indemnités de départ de Patricia Russo, directrice générale du groupe - un "parachute doré" de quelque 6 millions d'euros -, serait adoptée. Restait aux dirigeants à affronter les nombreux petits porteurs rassemblés pour l'occasion au Palais des congrès dans le 17e arrondissement de Paris.
Au départ, tout s'est bien passé. Serge Tchuruk, président du conseil d'administration de l'équipementier en télécommunications, n'a quasiment pas été chahuté. Mme Russo a même été applaudie après avoir prononcé une ou deux phrases en français... Pas de bronca donc, seulement quelques maigres huées.
Les critiques ont toutefois fusé lorsque les actionnaires ont pu prendre la parole. En ligne de mire, les indemnités de départ de Mme Russo, dont le mandat expire en 2010. Dans la résolution "7", soumise au vote des actionnaires, le versement de l'indemnité de départ - fixée à deux années du salaire fixe majoré du bonus maximal - est conditionné à des critères de performance. Il lui faut désormais atteindre 90 % de l'objectif de chiffre d'affaires et 75 % de l'objectif de résultat opérationnel pour déclencher le versement effectif du "parachute doré". Des critères qui ont surpris un actionnaire : "Si un objectif est fixé, il doit être atteint", a-t-il dit, s'étonnant d'un dispositif où l'on récompense un objectif non atteint.
RÉCRIMINATIONS
M. Tchuruk a alors précisé que Mme Russo touchera en 2008, au titre de l'exercice 2007, un salaire de 1,835 million d'euros, dont 635 000 euros de bonus.
Autre point de tension avec les actionnaires : le plan d'attribution de 800 000 stock-options à un prix d'exercice de 3,8 euros accordé à Mme Russo. Difficile à accepter pour des petits porteurs qui ont vu le cours de l'action perdre plus de la moitié de sa valeur depuis l'annonce de la fusion des deux groupes - l'américain Lucent Technologies et le français Alcatel - fin 2006. Le titre valait 4,86 euros vendredi 30 mai, à la fermeture de la Bourse de Paris.
Les récriminations sont d'autant plus fortes que les actionnaires ne toucheront pas de dividende cette année. Le groupe, qui a perdu 3,5 milliards d'euros en 2007, se trouve confronté à une concurrence de plus en plus féroce des équipementiers de télécommunications chinois.
La résolution "7" a toutefois été adoptée à plus de 80 % des voix. Peut-être parce que cette assemblée générale a aussi rendu plus simple la révocation des deux dirigeants d'Alcatel Lucent. La résolution "13" - elle permet leur révocation à la majorité simple des membres du conseil d'administration, et non plus à la majorité des deux tiers - a été littéralement plébiscitée, récoltant 98,5 % des suffrages. Une disposition qui avait été prise suite à la fusion des deux entreprises et dont la durée d'application avait été fixée à trois ans.
Laurence Girard, Le Monde.